Au Sénégal, la richesse culturelle et spirituelle se manifeste à travers diverses croyances et pratiques, parmi lesquelles les figures féminines qui jouent un rôle prépondérant. Les femmes porteuses sont un thème associé au quotidien et incarnent des aspects vitaux de la vie et de la société sénégalaise. Porteuses d’histoires et de pouvoirs, elles transcendent le simple rôle de sources d’inspiration pour se métamorphoser en véritables archétypes, incarnant des entités protectrices, guidant et veillant sur leurs peuples avec bienveillance. Ces archétypes féminins tirent leurs origines de récits ancestraux, où la femme est à la fois créatrice et gardienne de la vie, détentrice de mystères et de connaissances occultes. Elles symbolisent la connexion profonde entre le monde spirituel et le quotidien des communautés. L’une de ces figures emblématiques Mame Coumba est la déesse protectrice des pirogues clandestines. Elle veille sur les navigateurs et leurs embarcations lors des traversées périlleuses, souvent entreprises dans l’espoir d’une vie meilleure. Cette entité n’est pas seulement un symbole de protection mais aussi de courage et d’espoir face aux défis et aux dangers de l’océan. Elle incarne la force et la détermination des peuples sénégalais face aux épreuves. Par ailleurs, la déesse du foyer et sa calebasse magique Leeket Bi Koumpeu veille sur la maison et ses habitants, assurant harmonie, santé et prospérité. On l’invoque pour protéger contre les malheurs et pour maintenir la paix au sein du foyer. Maam Petaw, littéralement la déesse des koris et de la fertilité, est associée à la fertilité des femmes, des animaux et des cultures, jouant un rôle crucial dans les rites agricoles et les célébrations de la fécondité. Elle symbolise la continuité de la vie et la richesse de la terre.
Cette démarche artistique ne se limite pas à la simple représentation ; elle invite à une immersion profonde dans les récits ancestraux, donnant vie à des figures mythologiques souvent laissées dans l’ombre des récits dominants. En choisissant la terre comme matériau, l’artiste se connecte à l’élément même qui a nourri ces cultures pendant des millénaires, symbolisant la fertilité, la création et la transformation. La terre cuite, avec sa solidité une fois cuite, permet de capturer l’éternité de ces figures mythiques, tandis que la terre crue, plus éphémère, peut représenter leur aspect changeant et vivant. Chaque sculpture devient alors un pont entre le passé et le présent, une réinterprétation contemporaine qui dialogue avec les anciennes croyances et les valeurs du monde actuel. En mettant en lumière des déesses, des héroïnes et des figures maternelles de la mythologie féminine d’Afrique de l’Ouest, l’artiste participe à un mouvement de valorisation et de réappropriation culturelle. Ce processus de création est aussi une invitation à réfléchir sur les thèmes universels de la féminité, de la force, de la création et de la destruction. Il encourage une prise de conscience de la richesse des mythologies africaines, souvent méconnues ou sous-représentées dans les discours artistiques globaux. En fin de compte, ces œuvres d’art ne sont pas seulement des représentations; elles sont des actes de mémoire, de revendication et de célébration de l’héritage culturel africain reconnaissant le rôle vital des femmes dans le tissu social.
Artiste plasticienne céramiste née en 1983, Emmanuelle Custine est diplômée du DNSEP(diplôme national supérieur d’arts plastiques) et également professeure d’Arts Plastiques dans le secondaire.
Elle expérimente plusieurs médiums : installations, sculpture, photographies, vidéos et cela dans une recherche artistique autour du lien qui unit l’Homme à la Nature, au Vivant.
Elle travaille principalement avec des matériaux naturels, avec les éléments eau, feu, air, terre pour créer des espaces rythmés, des environnements où l’art tisse ce lien terrestre, « Terre-être ».
Elle attache beaucoup d’importance à la danse car elle est elle-même danseuse. Aussi, ce besoin de faire ressurgir dans sa pratique artistique le mouvement, notre rapport à la terre et l’implication du corps dans un espace naturel est primordial. Par ailleurs, les différents paysages (volcaniques, forêts, plages, rivières…) de la Réunion, apparaissent comme des portes tournées vers l’imaginaire, un atelier à ciel ouvert des lieux d’inspiration et de création. Comme la danse, le mouvement est partout, il est présent dans la nature et dans le corps. Il fait surgir ou ressurgir ce lien naturel, il est la présence de cette alliance naturelle entre l’Homme et la nature.
Après un Bac littéraire option arts, elle a commencé un Deug (Bac+ 2) en Histoire de l’Art/ Arts Plastiques à l’Université d’Aix en Provence, puis elle a suivi une première année aux Beaux-Arts du Port à l’île de La Réunion. Elle a mis entre parenthèse ses études d’art pour entreprendre des études en Littérature. Son Master validé à l’Université de Saint Denis de La Réunion, l’envie de voyager l’a fait prendre le cap vers l’Australie où elle s’est m’installée à Sydney pendant trois ans. La rencontre avec l’art aborigène australien, le «Dot painting », ses voyages dans les terres, dans le désert d’Alice Spring et son célèbre Ayers Rock (Uluhuru) ont été une réelle reconnexion et une source d’inspiration plus tard dans ses créations.
De retour à La Réunion en 2013, elle découvre son medium de prédilection, l’argile et réalise plusieurs séries de corps féminins « Fam métis » (femmes métisses) , représentatifs du métissage issu de la diaspora de son île. Diplômée du DNA des Beaux- Arts du Port en 2020, elle ouvre sa pratique artistique sur une vision plus contemporaine et se découvre une passion pour les installations avec des matériaux naturels, les éléments eau, feu, air, terre qu’elle rassemble et sublime pour créer des espaces rythmés, géopoétiques, où l’art tisse ce lien terrestre « Terre-être ».
Après son DNA (diplôme national d’art ) en 2020, elle s’est également tournée vers la réalisation d’installations qui explore cette notion de LIEN, de TISSAGE, de MAILLAGE en intégrant dans sa pratique des matériaux de recyclage (fer, tôle, fils, plastique…) et des fibres ( chanvre, raphia, choka). Et puis il y a cette connexion qui l’unit aux ancêtres de son île. Avec de l’argile, en peinture ou en dessinant avec du feu sur des découpes de métal, elle rend hommage à la mémoire.
EXPOSITIONS PERSONNELLES & COLLECTIVES :
Mai 2024 :
« CHAOS 3 » Exposition collective immersive. Galerie Mémoires Africaines, Saly, Sénégal.
Marraine et directrice artistique de l’association Kouleur Tèr, suivi du projet d’exposition à la maison Serveau, Île de la Réunion.
Décembre 2022 :
« CIMARRONES » dédiée au marronage et à la mémoires des esclaves. Artiste et commissaire d’exposition. Hôtel des postes de Saint-Leu, Île de la Réunion.
Mai 2022 :
« OFF » de la Biennale de Dakar. Artiste et commissaire d’exposition. Maison Serveau, Saint paul, Île de la Réunion.
Mars 2022 :
« MAMON LA TÈR » dédiée aux femmes artistes dans le cadre de la journée de la femme. La Friche, espace artistique au Port, Île de la Réunion.
Juin 2022 :
Installation et scénographie dans le cadre de présentation de son DNA autour de la thématique « Corps et graphie dans le paysage réunionnais ». galerie de l’Ecole supérieur d’art da la Réunion (ESAR).
Mars 2020 :
« FANM DAN KÈR ». Sculptures féminines en céramiques. Pôle culturel de Trois-Bassins, Île de la Réunion.